25 octobre 2011

L’incinérateur de Lescar inquiète les éboueurs de l’agglo paloise

La République des Pyrennées
Par Eric Bély, Publié le 25/10/2011 à 04h00
Mise à jour : 25/10/2011 à 09h05

Ce sont les agents de collecte de la communauté d’agglo qui ont levé le lièvre hier matin. Plusieurs d’entre eux ont en effet exercé leur droit de retrait. Après avoir collecté comme d’habitude les sacs d’ordures ménagères, ils ont refusé de vider leurs bennes dans la fosse de l’incinérateur de Lescar.

La raison ? Ils s’inquiètent pour leur santé. « Nous avons été informés jeudi en fin de matinée par notre autorité que deux faits graves se sont produits en février et en mai dans l’usine d’incinération, explique Fabrice Lecerf membre élu de la CGT. Des résidus brûlés ont été balancés dans la fosse en milieu confiné alors qu’ils n’auraient pas dû l’être. » Forcément chez les agents de collecte, on s’interroge : « On ne connaît pas la nature du produit. A priori, il s’agirait de métaux lourds ».

C’est la société Novergie qui assure le fonctionnement de l’incinérateur, comme prestataire pour Béarn Environnement à qui le Syndicat mixte de traitement des déchets du bassin Est (SMTD) a délégué la gestion du site. « A la mi-septembre, nous avons été équipés de masques de protection sans que l’on nous en donne la raison », relatent les agents. L’analyse de la qualité de l’air demandée par Béarn Environnement ne suffit pas à les rassurer, même si elle ne révèle rien d’alarmant. « Elle a été réalisée au mois de septembre, 6 mois après les faits », note Fabrice Lecerf. Hier, les 142 agents de collecte ont reçu un courrier de l’Agglo les invitant à passer des examens médicaux incluant une prise de sang et des radios du poumon. De même que tout le personnel des entreprises ou personnes ayant eu accès au hall de réception de l’incinérateur. Marc Jubault Bregler évoque « un principe de précaution maximum ».

Face à cette inquiétude des agents, le président du SMTD, et vice-président de la commission environnement à l’Agglo, s’est en effet rendu sur place en fin de matinée.

Le produit déversé dans la fosse ? Des réfiom. Des résidus de fumée d’incinérations d’ordures ménagères qui bouchaient le filtre. Ils sont considérés comme déchets ultimes en raison de leur fort contenu en produits toxiques : plomb, mercure, arsenic, cuivre, zinc.... Ce type de bourrage est « classique ». Selon les agents, les résidus sont d’habitude évacués par camions pour être enfouis sous du béton. Sauf que là, ils ont été balancés dans la fosse. A deux reprises, le 28 février et le 16 mai.

C’est une lettre anonyme, accompagnée d’une vidéo, reçue fin août par Martine Lignières-Cassou et Nathalie Kosciusko-Morizet, la ministre de l’Ecologie, qui a donné l’alerte.

Selon Marc Jubault-Bregler, un rapport de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (la Dreal, ex-Drire), qui s’est rendue sur site le 9 septembre avec l’Inspection du travail, a conclu à une « faute grave » de la part de Novergie. « En opposition totale avec l’arrêté préfectoral d’exploitation ».

Le dossier aurait été transmis par la préfecture au procureur de la République. L’Agglo et le SMTD « se réservent le droit de porter plainte par la suite ». Le préfet François Xavier Ceccaldi confirme pour sa part que « des fautes graves ont été notifiées à l’exploitant ». « C’est un dossier que je suis de très près », précise-t-il. Avec une attention particulière pour « la planification des opérations de dépollution ». Reste à voir si tout cela suffira à rassurer les éboueurs.

===> La société Novergie dans le viseur

L’incinérateur de Lescar est exploité par la société Novergie. Celle-ci agit comme prestataire pour Béarn Environnement, délégataire du Syndicat mixte de traitement des déchets (Smtd) pour la gestion du site. Peut-être plus pour longtemps.

En effet, le président du Smtd Marc Jubault Bregler par ailleurs en charge de l’environnement à l’Agglo est particulièrement remonté. Au delà des fautes incriminées (le déversement de produits contenant des métaux lourds dans la fosse de l’incinérateur), le fait d’apprendre ces incidents par le biais d’une lettre anonyme passe mal : « Aussi bien l’Agglo que le Smtd comptent mettre Novergie face à ses responsabilités. Et je vais faire pression sur Béarn Environnement pour cela ». « « En cas de faute grave, le contrat tombe par lui-même », précise-t-il. Et d’assurer que tous les tests médicaux réalisés seront à la charge de Novergie qui « doit assumer les conséquences financières de ses actes ». « Ces incidents ont été dissimulés à Béarn Environnement et au SMTD jusqu’à la lettre anonyme, fustige Jean-François Bigot, président de Béarn Environnement. Le métier des déchets impose de la transparence » Il évoque « une rupture du contrat de confiance ». Et précise : « Nous avons envoyé un courrier préalable à une rupture de contrat à Novergie ».

Du côté de la société exploitante, Franck Blanpain, le directeur délégué à l’incinération pour Novergie Sud-Ouest précise que le déversement des résidus de filtre dans la fosse n’a pas induit de « nuisance environnementale. « S’il y avait eu un problème majeur, la Dreal (ndlr, Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) aurait fermé le site lors de sa visite le 9 septembre. » Pourquoi dès lors, la direction locale n’a-t-elle pas signalé l’incident ? « Cela fait partie des aléas d’exploitation d’une usine d’incinération.

C’est pour cela qu’il n’y a pas eu de communication au moment des faits ». « Aujourd’hui, on gère l’incident, poursuit Franck Blanpain. On cherche des solutions pour que cela ne se reproduise pas. On a fait faire des analyses. On va faire en sorte que le hall de réception soit nettoyé. Novergie montre son expertise et son professionnalisme. On espère que le Smtd et Béarn Environnement sauront le reconnaître.

Incinérateur de Lescar : Novergie "ne pouvait pas ne pas savoir"

Par Valérie Cèbe, publié le 10 janvier 2014.

L’affaire de la double pollution survenue en 2011 à l’incinérateur de Lescar a été à nouveau examinée hier devant la cour d’appel.

http://www.larepubliquedespyrenees.fr/2014/01/10/incinerateur-de-lescar-novergie-ne-pouvait-pas-ne-pas-savoir,1173416.php


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